Nous vivons une époque où la liberté comme idéal et les valeurs de liberté se perdent. Où le libéralisme, largement incompris, est souvent vu comme une cause profonde, voire la cause unique des malheurs du monde. Une large part des jeunes générations voit en lui un système oppresseur à dépasser et non la voie pour leur avenir meilleur.
C’est là l’analyse que l’auteur, Jean-Marc Paturle, a faite ; c’est elle qui l’a poussé à se lancer dans l’écriture. Pour transmettre le libéralisme comme cadeau et précieux héritage à ses enfants, et plus largement à la jeunesse.
Jean-Marc Paturle, père de cinq enfants, est polytechnicien et ingénieur des Ponts et Chaussées. Après un premier parcours professionnel partagé entre administration et privé, il reprend la responsabilité de l’entreprise familiale, forte d’environ 500 personnes, entre France, États-Unis et Inde. Il a depuis créé une organisation humanitaire au Mali et au Burkina Faso qui, aujourd’hui, réunit plusieurs milliers de cultivateurs africains.
L’auteur n’est pas tombé dans le libéralisme quand il était petit. De par sa formation, au contraire, il fut un parfait produit du système éducatif. Mais son emprise avec le terrain, avec la vraie vie, et ses lectures sans doute, lui ont apporté un autre regard et le bagage intellectuel pour relire le monde.
Aussi décide-t-il de se lancer dans l’écriture de ce livre, afin de transmettre cette découverte à ses enfants, d’abord, puis au-delà afin de nous donner un texte simple, accessible et contemporain à offrir à nos propres enfants
Comparé à d’autres ouvrages, ce livre n’est pas une encyclopédie de la liberté. Parfois même, le lecteur exigeant pourra ne pas se retrouver dans les arguments avancés. Peu importe, car il s’agit d’un texte d’introduction destiné au plus grand nombre qui reste de qualité indéniable. Pour preuve la préface originale du Professeur Pascal Salin, qui ne s’y était pas trompé. Ce livre est un tremplin vers les autres, il ouvre la porte du libéralisme.
L’approche que suit Jean-Marc Paturle pour nous parler de libéralisme est pragmatique. En entrepreneur qu’il est, il puise dans la vie économique le cœur de son argumentaire. Être libre, cela doit pouvoir se vivre et se voir. Être libre, pour lui qui sait ce que sont les pays « pauvres », cela doit sortir les gens de la pauvreté, cela doit leur permettre de vivre plus longtemps.
Le livre commence donc par deux leçons d’économie ; une première sur le capitalisme à travers les circonstances de sa naissance et de la naissance de l’industrie moderne ; la seconde sur l’économie de marché libre, dont je tiens à souligner et saluer les fondements pris chez l’école autrichienne.
Vient ensuite un chapitre plus original chez les libéraux, directement tiré des thèses de N. N. Taleb, où l’auteur entreprend de nous convaincre que l’inégalité et le risque, les deux grands prétextes à l’extension du pouvoir dans nos social-démocraties, ne se prêtent absolument pas au simplisme de l’argumentaire pseudo scientifique employé par les politiciens. L’angle pris pour dénoncer l’étatisme galopant, sans pourtant aller sur le terrain du droit (naturel versus positif), est un des clairs intérêts de cet ouvrage.
Un autre sujet où le texte se distingue tient à sa critique de la démocratie, modèle de régime pourtant presque sacré pour bien des libéraux. L’auteur évoque bien sûr la démocratie directe de la Suisse, mais il sait voir que ce qui cause la plus grande la résistance de ce pays à l’étatisation accélérée est bien plus sa décentralisation en cantons que ses multiples votations.
Bien sûr, Jean-Marc Paturle ne se limite pas à l’explication des principes, il a bien conscience que l’avenir de la liberté pose un problème. Pour l’aborder, une analyse historique du XXe siècle rappelle la trajectoire. Le virage que marque la Grande Guerre de 14-18 – virage démocratique, économique, géopolitique – l’influence de Keynes qui rendit la monnaie «magique», le mensonge marxiste devenu omniprésent et la déformation des principes des droits de l’homme sont mis à jour par sa critique lucide. Si le bilan est lourd, la perspective que l’auteur en retire reste optimiste !
Enfin, la dernière partie marque le pragmatisme de l’auteur, qui termine avec les réponses à une batterie de questions fréquemment posées par les incrédules. Le libéralisme en 10 questions et 5 pages, voilà qui est simple !
Ce livre mérite de nombreux lecteurs, il mérite sa réédition. Il est à mettre entre toutes les mains, à commencer par celles des jeunes générations.
Stéphane Geyres
Directeur de Collection